Insultes de Hanouna à Louis Boyard : la chaîne C8 condamnée à une amende record de 3,5 millions d’euros

Insultes de Hanouna à Louis Boyard : la chaîne C8 condamnée à une amende record de 3,5 millions d’euros

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Par Konbini avec AFP

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Des propos qui "ont porté atteinte aux droits de l’invité, au respect de son honneur et de sa réputation".

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Machine à clashs générateurs d’audience, Cyril Hanouna commence à coûter cher à C8 : la chaîne a été condamnée jeudi à une amende record de 3,5 millions d’euros après les injures lancées en direct par son animateur vedette au député LFI Louis Boyard en novembre.

“Abruti”, “tocard”, “t’es une merde” : ces propos “ont porté atteinte aux droits de l’invité, au respect de son honneur et de sa réputation”, a tranché le régulateur des médias, pour qui cette séquence a traduit “une méconnaissance par l’éditeur de son obligation de maîtrise de son antenne”.

Ce n’est pas la première fois que l’Arcom sanctionne financièrement C8 à cause de son animateur : elle s’était déjà vue infliger une amende de 3 millions d’euros en 2017 pour un canular jugé homophobe sur le plateau de Touche pas à mon poste !

L’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique a également indiqué jeudi avoir mis en demeure la chaîne de respecter ses obligations en matière d’honnêteté et d’indépendance de l’information.

Elle a considéré que Louis Boyard “avait été explicitement empêché d’exprimer en plateau un point de vue critique à l’égard d’un actionnaire du groupe Canal+ auquel appartient le service de télévision C8”, ce qui n’avait pas permis de réaliser l’émission “dans des conditions qui garantissent l’indépendance de l’information”.

“On prend acte de la décision de l’Arcom et on va se réserver le droit de voir ce qu’on va faire après”, a indiqué Cyril Hanouna jeudi soir dans son émission. “Le milliardaire Bolloré a voulu me censurer. On a Touché à Son Poste”, a pour sa part réagi Louis Boyard sur Twitter.

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Cette décision du régulateur, autorité indépendante du gouvernement, survient dans un contexte de tensions entre Canal+, filiale du groupe Vivendi piloté par le milliardaire conservateur Vincent Bolloré, et la ministre de la Culture, Rima Abdul-Malak.

Cette dernière a jugé jeudi matin, sur France Inter, “inadmissible” l’appel récent de Cyril Hanouna à la privatisation de l’audiovisuel public, soulignant que le Rassemblement national est le seul parti qui défend cette mesure. “Privatisez-moi ça”, avait lancé mi-janvier l’animateur de Touche pas à mon poste ! qui rassemble plus d’un million de téléspectateurs chaque soir.

La ministre a également évoqué à la radio la possibilité pour l’Arcom de retirer à CNews et C8 les fréquences mises à leur disposition quand elles ne respectent pas leurs obligations. “Nous avons été profondément choqués par les propos tenus par madame la ministre de la Culture”, a réagi Canal+ dans un communiqué publié jeudi après-midi.

Tensions Canal+ vs gouvernement

“Près de cinq minutes de son intervention ont été consacrées à la critique de notre groupe et à des invectives contre nos chaînes C8 et CNews”, s’est offusqué le groupe. “En laissant à nouveau entendre que” leurs licences “ne mériteraient pas d’être renouvelées en 2025”, la ministre “prend parti, sort de sa réserve et ne respecte pas l’indépendance de notre régulateur sectoriel”, a-t-il ajouté.

Cette passe d’armes n’est pas nouvelle. Sur un éventuel non-renouvellement des fréquences TNT, déjà évoqué par Mme Abdul-Malak, le patron de Canal+, Maxime Saada, avait précédemment répliqué qu’“un ministre ne devrait pas dire ça”.

“Je suis dans mon rôle quand je rappelle le cadre existant”, s’est-elle défendue jeudi. “Il y a des obligations à respecter. Il y a déjà eu une vingtaine d’interventions de l’Arcom, depuis 2019, pour C8 et CNews. Au bout de combien d’interventions l’Arcom pourra-t-elle dire à quel degré les obligations ne sont pas respectées ? C’est le rôle de l’Arcom”, a-t-elle poursuivi.

Plus généralement, la ministre a critiqué Vincent Bolloré, régulièrement accusé de censure ou de vouloir orienter la ligne éditoriale des médias qu’il détient. “On a eu un certain nombre d’exemples, dans les derniers mois, les dernières années, qu’il s’agisse de Canal+, […] de Paris Match, […] qu’il s’agisse d’Europe 1, qu’il s’agisse de l’édition… Il y a un certain nombre d’alertes, sur la liberté de création, sur la liberté d’expression”, a-t-elle détaillé.

Hasard du calendrier, jeudi, la Cour européenne des droits de l’Homme a par ailleurs débouté C8 qui contestait sa précédente amende de 3 millions, au nom de la liberté d’expression.

De nouvelles échéances attendent encore le groupe Canal+ : le régulateur doit se prononcer cette fois sur des propos anti-musulmans tenus en décembre par un chroniqueur de CNews.