Il a longtemps été admis que l’art pariétal (une jolie formule pour parler d’œuvres réalisées sur des parois) s’était plutôt développé avec les Homo sapiens. Le temps passant, les hypothèses évoluent et s’affinent. En 2013 déjà, l’anthropologue états-unien Dean Snow soulevait l’hypothèse que les premiers artistes de l’histoire de l’humanité étaient en réalité des femmes, alors qu’on avait toujours parlé d’hommes préhistoriques chasseurs et créatifs, qui rapportaient sur les murs le compte rendu de leur dur labeur quotidien, tandis que les femmes ne s’occupaient que de la cueillette.
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Dans son livre Homo Sapiens Rediscovered et dans un article publié dans la revue The Conversation, le professeur d’archéologie paléolithique Paul Pettitt – qui s’intéresse notamment aux origines de l’art – rappelle qu’il y a 250 000 ans, “les Néandertaliens mélangeaient des minéraux tels que de l’hématite (ocre) et du manganèse avec des fluides afin de créer des peintures rouges et noires”. À l’époque, ils auraient surtout utilisé ces peintures pour orner leurs corps et leurs parures, sans doute comme un moyen d’affirmer “leur force et leur pouvoir” auprès de leurs contemporain·e·s.
Être (de l’art) ou ne pas être (de l’art)
185 000 ans plus tard, il semblerait que les Néandertalien·ne·s se soient mis·es à utiliser leurs pigments rouges pour couvrir les murs de grottes sud-espagnoles. C’est sans doute parce que les vestiges de leurs œuvres étaient plutôt abstraits, au contraire des silhouettes humaines et animales des Homo sapiens, que l’Histoire n’a pas retenu leurs productions comme étant de l’art.
Aujourd’hui pourtant, les paradigmes ont semble-t-il évolué et “les archéologues commencent à reconnaître la créativité de l’art néandertalien pour ce qu’il était”, explique Paul Pettitt. “L’art figuratif n’est pas un emblème de modernité et son absence n’est pas une indication de primitivité”, poursuit-il dans un souffle salvateur, qui nous extrait de conceptions souvent très centrées autour de nos regards contemporains.
L’archéologue ajoute que l’art néandertalien “se rapportait sans doute moins à des individualités et davantage à des communautés”. Ainsi, les traces laissées par ces différentes espèces nous donnent des indices quant à la façon dont elles vivaient et appréhendaient leur humanité. Ces réflexions et leurs évolutions nous permettent une remise en question tout aussi intéressante quant à la définition même d’art.