Toute sa vie, et même après sa mort, Boris Lurie a bravé les obstacles et défié les circonstances que l’histoire imposait à son existence. À 16 ans, l’adolescent est arrêté par les nazis et passe quatre ans enfermé dans plusieurs camps de concentration, notamment celui de Buchenwald. Fin 1941, plus d’un an après son emprisonnement, Boris Lurie perd “sa mère, sa sœur, sa grand-mère et sa petite amie adolescente” lors du massacre de Rumbula, précise sa fondation.
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Il survivra et ne s’éteindra qu’au siècle suivant, à l’âge de 84 ans. Traversée d’une part par l’horreur, sa vie est également marquée par sa pratique artistique. Une pratique jamais récompensée de son vivant et indissociable des traumatismes qu’il a vécus, tel que le démontre une exposition présentée à New York, au Museum of Jewish Heritage.
Boris Lurie, Portrait de ma mère avant sa mort. (© Boris Lurie Art Foundation)
À 13 ans, Boris Lurie réalise sa première œuvre, un nu, et ne s’arrête plus. L’artiste est autodidacte (il écrit dans ses carnets n’avoir “rien d’autre à faire que d’essayer”, une phrase choisie comme titre de l’exposition new-yorkaise) et refuse de jouer selon les règles du marché de l’art. C’est pourquoi, en 1959, dix ans après son arrivée sur la côte est états-unienne, il crée NO!art, un “mouvement radical avant-gardiste contre l’establishment artistique”.
Une vie en décalage
Boris Lurie exècre le marché de l’art qui, semble-t-il, le lui rend bien. “Pour la plupart, les critiques et conservateurs de l’époque rejetaient Lurie et NO!art”, écrit la fondation du peintre. “Il n’a jamais vendu une toile, il vivait dans des taudis […]. C’était quelqu’un de compliqué”, déclarait son président, Anthony Lurie, à l’ouverture de l’exposition new-yorkaise, déclare The Guardian.
Boris Lurie, Appel au camp de concentration. (© Boris Lurie Art Foundation)
Bien que vivant dans la misère, Boris Lurie était à la tête d’une grande fortune (près de cent millions de dollars à sa mort), amassée grâce à des achats immobiliers à New York puis des placements en Bourse. The Guardian précise qu’à l’époque, ses ami·e·s se demandaient parfois “s’il n’essayait pas, en quelque sorte, de recréer la façon dont il vivait à Buchenwald”.
Son mode de vie décalé interroge aujourd’hui encore les critiques, qui lient également les atrocités qu’il a vécues dans son enfance et son adolescence à sa pratique artistique : ses traumatismes auraient-ils formé son incapacité à pleinement profiter de sa vie ? Son travail en est, quoi qu’il en soit, clairement infusé, qu’on parle de ses thèmes, couleurs ou traits. La pesanteur de ses œuvres, et de son histoire, invite le public à de nouveau se pencher sur les horreurs de la Seconde Guerre mondiale.
Boris Lurie, Sans titre (autoportrait). (© Boris Lurie Art Foundation)
Boris Lurie, Libération de Magdebourg. (© Boris Lurie Art Foundation)
L’exposition “Nothing To Do But To Try” de Boris Lurie se tient au Museum of Jewish Heritage jusqu’au 29 avril 2022.