“Comment je me suis retrouvée là ?” ; “Je ne suis pas un numéro, je suis un être humain” ; “À l’aide, à l’aide, à l’aide” : voici certaines des pensées qui constellent The Book of Homelessness, le “premier roman graphique créé par des personnes sans-abri”. Les 160 pages de textes, dessins, peintures et photographies qui composent l’anthologie traitent de solitude, de souffrance, de maltraitance, de racisme, d’homophobie, mais aussi d’histoires de famille, d’amour et de lutte. L’ouvrage retrace les “parcours qui mènent à la rue”, tel que le note The Guardian, soit des “témoignages de viols, d’agressions sexuelles, de toxicomanie et de ruptures familiales”.
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Marice Cumber, fondatrice de l’organisation britannique Accumulate, “une école artistique pour les sans-abri”, déplorait le fait que les écrits traitant de la vie dans la rue soient réalisés par des personnes n’ayant pas vécu cette réalité. En 2019, avec la dessinatrice Henny Beaumont, elle rêve d’un projet qui “renverserait cette norme” et “redonnerait un contrôle créatif, un sentiment d’appropriation et une identité à ceux dont c’est l’histoire”. “Un groupe souvent défini sans visage, de façon homogène et stéréotypée, marginalisée”, souligne-t-elle.
Shianne. (© Accumulate)
L’idée est plantée. Elle germe grâce aux volontaires qui rejoignent le projet, via le bouche-à-oreille et un mail envoyé par Marice aux centres d’hébergement, auberges et organisations venant en aide aux personnes réfugiées, sans papiers et survivantes de guerre. Chacun·e est alors invité·e à raconter son histoire individuellement, avec le soutien d’une équipe de tuteur·rice·s (dont la moitié a également vécu dans la rue) lors d’ateliers créatifs.
L’art comme exutoire intime et social
Les ateliers, précise Marice Cumber, concentraient des volontés aussi pratiques que psychologiques. En même temps qu’ils y apprenaient et approfondissaient des techniques d’écriture, de dessin, de peinture et de typographie, les auteur·rice·s discutaient de leurs projets personnels, de la façon de se raconter et de leur passé : “Ça m’a sortie de mon foyer et m’a aidée à me sortir de difficultés liées à ma santé mentale. Ça m’a permis de me sentir plus connectée socialement aux autres”, relate Amalia, une des autrices du livre, qui affirme que travailler sur son histoire a été “thérapeutique”.
“The Squat”. (© Accumulate)
Pour que le projet voie le jour, Accumulate a organisé une levée de fonds (qui a permis de rassembler 18 000 livres sterling, près de 20 000 euros) afin de financer “les ateliers, le matériel, la présence de tuteurs, les repas et transports des participants, la direction artistique du projet, la production du livre et son lancement”.
Les bénéfices, nous précise-t-on, sont partagés entre les auteur·rice·s et Accumulate, “afin de continuer à mettre en place des ateliers créatifs pour les sans-abri”. Depuis la création de l’organisation, en 2013, vingt personnes ont d’ailleurs pu partir étudier dans des écoles d’art. Sur le court terme, pour Amalia, le plus important reste de “modifier les récits liés à la vie dans la rue” et porter la voix des sans-abri.
Ria Renee. (© Accumulate)
“Nikolett Eszes”. (© Accumulate/Tori Lens)
© Accumulate
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Amalia Walrond. (© Accumulate)
Dave Sohanpal. (© Accumulate)
Dave Sohanpal. (© Accumulate)
Farahnaaz Roshan. (© Accumulate)
Jade Amoli-Jackson. (© Accumulate)
Jade Amoli-Jackson. (© Accumulate)
Luke Smith. (© Accumulate)
Luke Smith. (© Accumulate)
Mitchell Ceney. (© Accumulate/Tori Lens)
Mitchell Ceney. (© Accumulate)
Mitchell Ceney. (© Accumulate)
Mitchell Ceney. (© Accumulate)
© Accumulate
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Ria Renee. (© Accumulate)
“Spare Change (page 1)”. (© Accumulate)
“Spare Change (page 2)”. (© Accumulate)
The Book of Homelessness, conçu par Accumulate, est disponible ici.