Avec pas moins de 12 millions de personnes en situation de handicap et 11 millions de proches aidants, une très large partie de la population française est touchée par cette problématique. Pourtant, cette dernière semble invisibilisée et de nombreuses inégalités subsistent. En témoigne le taux de chômage chez les personnes en situation de handicap, qui correspond au double de la moyenne nationale, et l’allocation adulte handicapé (AAH) et son mode de calcul tant décrié.
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Ce minimum social, inférieur au seuil de pauvreté et ayant pour but de compenser une incapacité à travailler, est toujours calculé en fonction des revenus du conjoint, entraînant une forte dépendance au sein des couples, et ce malgré la forte mobilisation qui a eu lieu dans l’Hexagone ces derniers mois pour déconjugaliser son mode de calcul.
Sans oublier des discriminations au quotidien, une accessibilité des lieux publics bien loin d’être satisfaisante, de grandes lacunes concernant la scolarisation des enfants en situation de handicap, poussant parfois certains parents à sortir leurs enfants du système scolaire, ou encore un manque de moyens criant dans les centres spécialisés.
À l’approche d’un nouveau mandat, que proposent les divers candidats à l’élection présidentielle pour améliorer le quotidien des personnes en situation de handicap ? Tour d’horizon de leurs programmes, par ordre alphabétique.
À noter qu’il s’agit là de relever ce qui est véritablement inscrit dans le programme des candidats, ce qui constitue donc des promesses de campagne, plus ou moins précises, inscrites sur leurs sites officiels, et non des prises de position antérieures, tels que des propos tenus dans les médias ou en meeting.
Nathalie Arthaud
Nathalie Arthaud. (© Reuters/Sarah Meyssonnier)
- un objectif “zéro chômeurs”, qui inclut de facto les personnes en situation de handicap ;
- la déconjugalisation et la revalorisation de l’AAH ;
- la prise en charge intégrale par la collectivité des compensations liées au handicap ou à toute perte d’autonomie, qu’il s’agisse d’aides matérielles ou humaines ;
- l’application de la mise en conformité des bâtiments publics pour faciliter leur accès et de la loi des quotas d’embauche en entreprise.
Nicolas Dupont-Aignan
Nicolas Dupont-Aignan. (© Reuters/Christian Hartmann)
Le fondateur de Debout la France propose quant à lui 29 mesures. Pour “allouer de nouvelles ressources” aux personnes en situation de handicap, il propose :
- la déconjugalisation de l’AAH ainsi que sa revalorisation de 160 euros pour atteindre le seuil de pauvreté ;
- le rétablissement de l’allocation complément de ressource ;
- l’accord d’une part fiscale complète aux familles ayant un enfant en situation de handicap ;
- l’ouverture aux personnes en situation de handicap des réductions pour l’accès aux divertissements et à la culture, comme celles des chômeurs ou des étudiants ;
- l’amélioration du fonctionnement des maisons départementales d’autonomie (MDA) et faire que l’autisme permette d’y “ouvrir des droits”.
Nicolas Dupont-Aignan veut “reconnaître la place et le rôle des aidants dans notre société”. Pour cela, il promet de :
- soutenir les aidants en entreprise ;
- revoir les conditions d’octroi de l’allocation de l’éducation de l’enfant handicapé (AEEH).
Afin d’assurer la possibilité d’être formé et de travailler, il liste :
- des contrôles renforcés et des incitations pour atteindre le quota prévu par la loi de 1987 de 6 % de personnes en situation de handicap en entreprise ;
- l’exonération de cotisations sociales patronales, et ce pour les deux premières années d’embauche, “des entreprises embauchant un salarié reconnu travailleur handicapé avec un taux d’incapacité permanente supérieur à 50 %” ;
- la mise en place de formations dans l’intervalle précédant la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé pour faciliter la réinsertion ;
- le doublement du nombre d’apprentis en situation de handicap entre 2022 et 2027 ;
- la favorisation du covoiturage entre salariés valides et en situation de handicap.
Pour garantir l’accessibilité, il considère qu’il faut :
- définir “une date butoir réaliste” pour la mise en accessibilité des personnes en situation de handicap aux transports en commun, à la voirie, aux administrations, aux entreprises, aux bâtiments ou encore aux commerces ;
- financer l’aménagement des véhicules de personnes en situation de handicap ou de parents dont l’enfant est en situation de handicap ;
- développer les nouvelles technologies pour faciliter l’indépendance et l’autonomie tels que des “fauteuils intelligents” ;
- reconnaître officiellement les bienfaits des chiens d’assistance en tant que véritables auxiliaires de vie à destination des personnes mal et non voyantes et des personnes à mobilité réduite ;
- permettre à chacun d’accéder à une structure adaptée à son handicap en créant par exemple dans chaque département une unité destinée aux personnes vieillissantes ;
- garantir l’accès à la culture et au sport notamment en proposant des signeurs de salles dans les spectacles vivants ou en créant un chèque handisport.
Concernant la scolarisation des enfants en situation de handicap, le candidat liste comme propositions :
- garantir une place par l’Éducation nationale dès 3 ans ;
- augmenter le nombre d’instituts médico-éducatifs (IME) ;
- encourager l’apprentissage de la LSF et la proposer en option dès le secondaire ;
- généraliser les livres audio à usage scolaire ;
- augmenter le nombre de contrôles inopinés dans les MDPH.
Anne Hidalgo
Anne Hidalgo. (© Stéphane Le Tellec/AbacaPress)
La candidate du Parti socialiste promet quant à elle, en cas d’accession à l’Élysée, de “garantir l’égalité pleine et entière à tous les âges de la vie”. Pour cela, la maire de Paris propose :
- la déconjugalisation de l’AAH ;
- la création d’un statut pérenne pour les AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap) ;
- la formation renforcée de l’ensemble des personnels de l’Éducation nationale autour d’un “projet d’école inclusive” ;
- l’accessibilité universelle menée “en lien avec les maires et les acteurs du handicap” ;
- rendre les crèches plus inclusives pour les enfants en situation de handicap.
Yannick Jadot
Yannick Jadot. (© Laure Boyer/Hans Lucas)
Les engagements pris dans le programme de l’eurodéputé écologiste en matière de handicap sont les suivantes :
- garantir l’accès aux études supérieures aux personnes en situation de handicap ;
- donner plus de pouvoir au Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) ;
- créer une Agence de l’accessibilité universelle avec pour but de “veiller au respect des normes d’accès aux services et transports publics, aux médias et aux sites Internet essentiels pour les personnes en situation de handicap” ;
- généraliser la traduction en Français facile à lire et à comprendre (FALC), l’installation de repères sensoriels et visuels et les pratiques de numérique inclusif ;
- faire “réellement respecter la loi sur l’obligation d’emploi des travailleurs et travailleuses handicapés (OETH)” ;
- renforcer les contrôles dans les établissements spécialisés ;
- déconjugaliser et revaloriser l’AAH ;
- assurer “à toute personne handicapée qui le souhaite le droit de rester pleinement autonome et indépendante par des aides à son domicile” ;
- revaloriser le métier d’aide à domicile notamment en “rémunérant et en remboursant” les temps de transport ;
- “tendre vers le zéro reste à charge des soins et des équipements” ;
- protéger l’intimité des personnes en situation de handicap à l’hôpital et dans les institutions spécialisées, en proposant par exemple des chambres adaptées ;
- ajouter “un volet à la Prestation de compensation du handicap (PCH) concernant l’accompagnement à la parentalité des parents en situation de handicap”.
Jean Lassalle
Jean Lassalle. (© Thibaud Moritz/AbacaPress)
Les mesures listées dans le programme du fondateur de Résistons ! sont :
- définir une politique des handicaps “y compris non visibles” ;
- restructurer les MDPH afin de réduire les délais de prise en charge ;
- supprimer les seuils d’âge de la prestation de compensation du handicap ;
- déconjugaliser l’AAH ;
- former et revaloriser les AESH en généralisant les temps pleins à 24 heures avec un salaire net à 1 700 euros ;
- revaloriser le statut et le salaire des aidants ;
- adapter les logements, centres de loisirs et équipements urbains aux personnes à mobilité réduite ;
- proposer une formation adaptée à chaque enseignant accueillant un élève en situation de handicap.
Marine Le Pen
Marine Le Pen. (© Eliot Blondet/AbacaPress)
En ce qui concerne le programme de la candidate du Rassemblement national, il promet, en cas de victoire :
- d’individualiser et de revaloriser l’AAH ;
- de lancer un “grand plan” sur l’accès à la scolarité pour les enfants touchés par le handicap ;
- de faire appliquer la loi sur l’accès à tous les lieux et transports publics ;
- de revaloriser et augmenter la durée des aides destinées aux proches aidants avec la durée du congé de proche aidant portée à douze mois pour l’ensemble de la carrière : “Son indemnisation [qui sera déconjugalisée] sera indexée sur les revenus de la personne aidante, avec une couverture à 100 % des pertes salariales au niveau du SMIC, à 80 % jusqu’au salaire médian puis à 50 % au-delà [plafonnée à 3 000 euros net]“, précise-t-elle ;
- créer une indemnité spécifique de 300 euros mensuels “pour toute personne faisant le choix de vivre au domicile d’un proche dépendant ou de l’accueillir chez elle pour se consacrer pleinement à son accompagnement”.
Emmanuel Macron
Emmanuel Macron. (© Reuters/Sarah Meyssonnier)
Dans son programme, le président de la République candidat à sa réélection s’engage à :
- augmenter jusqu’à 35 heures le temps de travail des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) “pour les revaloriser et mieux aider les enfants”,
- et à mettre en place “un service du maintien à domicile avec un seul interlocuteur pour l’aidant ou la personne âgée pour organiser tous les services et une ‘Prime Adapt’’ prenant en charge, selon les ressources, jusqu’à 70 % des coûts des travaux d’adaptation”, tels que la salle de bain ou les escaliers.
Jean-Luc Mélenchon
Jean-Luc Mélenchon. (© Eliot Blondet/AbacaPress)
En ce qui concerne le député de La France insoumise, il propose en premier lieu de chercher à prévenir le handicap, en proposant, entre autres, de :
- renforcer le suivi médical durant les grossesses, renforcer les mesures de sécurité routière ;
- doubler les effectifs de l’inspection du travail ;
- renforcer la médecine du travail ;
- pour réduire le risque d’accidents du travail, de “restaurer les Comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), augmenter leurs moyens et rendre leurs avis contraignants” ainsi que “faire du nombre d’accidents du travail un critère de sélection dans l’accès aux marchés publics, afin de cesser de subventionner les entreprises productrices qui blessent ou mutilent les salariés”.
Pour assurer le droit à l’éducation, il souhaite notamment :
- augmenter le nombre des enseignants référents pour la scolarisation des élèves en situation de handicap “afin de garantir un suivi individualisé de qualité” ;
- développer en nombre suffisant les supports pédagogiques adaptés aux particularités de ces enfants et renforcer l’accessibilité aux équipements sportifs ;
- mettre en place des actions de sensibilisation pour lutter contre les discriminations, tout au long de la scolarité, depuis la maternelle jusqu’à la formation professionnelle, en incluant l’intervention de personnes en situation de handicap ;
- créer un véritable service public d’accompagnement des élèves en situation de handicap, avec un nouveau corps de fonctionnaires et un service de 24 heures pour un temps plein ;
- abaisser à dix le nombre maximum d’élèves par classe en unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS) et garantir à chaque élève une place dans une structure ULIS, en ouvrant le nombre de structures nécessaires.
Jean-Luc Mélenchon s’engage aussi, entre autres, à “garantir le droit à l’emploi” en :
- pérennisant le financement de l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap ;
- favorisant l’emploi des travailleurs en situation de handicap aux compétences reconnues ;
- surveillant les licenciements masquant une discrimination à l’égard des personnes en situation de handicap ou un souhait de ne pas adapter le poste de travail.
Le candidat insiste également sur l’importance du respect de la vie privée des personnes en situation de handicap, souhaite mener “une politique renforcée d’accès à la santé sexuelle et reproductive des personnes en situation de handicap, par une formation accrue du personnel soignant concerné et des campagnes de sensibilisation” et veut “prévoir un accompagnement spécifique” si celles-ci sont victimes d’agression sexuelle ou de viol.
En outre, Jean-Luc Mélenchon souhaite :
- déconjugaliser l’AAH et la revaloriser au niveau du Smic ;
- créer un véritable statut d’aidant familial “avec une rémunération réelle, une formation adaptée au handicap de la personne aidée, l’organisation de périodes de congés et/ou de repos (développer les plateformes de répit sur tout le territoire), l’attribution des heures d’aide extérieure en cas de maladie ou d’indisponibilité” ;
- revenir sur la loi ELAN et imposer 100 % de logements accessibles dans les constructions neuves et faire participer l’État aux financements des travaux d’adaptation des logements anciens ;
- atteindre l’accessibilité totale progressive des transports et espaces publics, y compris pour les personnes déficientes visuelles et viser l’objectif “zéro obstacle” ;
- mettre en œuvre la prise en charge par la Sécurité sociale des frais de psychomotriciens, d’ergothérapeutes et de psychologues, ainsi que de tous les équipements nécessaires à la vie quotidienne ;
- “adapter tous les services publics, procédures et documents administratifs aux handicaps et organiser la généralisation de ces dispositions aux services et entreprises privées (modes de communication, prises de rendez-vous, etc.)”.
Valérie Pécresse
Valérie Pécresse. (© Ludovic Marin/Pool via Reuters)
La candidate des Républicains propose pour sa part de “renforcer l’autonomie des personnes”. Pour cela, elle souhaite :
- déconjugaliser l’AAH ;
- “faire en sorte qu’à l’avenir, les enfants handicapés aient droit, au décès du dernier parent, à la pension de réversion dont il bénéficiait” ;
- leur “laisser le choix de leurs parcours de vie”.
Elle indique aussi vouloir “aller vers l’accessibilité universelle” en :
- réformant la Prestation compensatrice du handicap (PCH) et en harmonisant les politiques de reconnaissance et de compensation du handicap ;
- modernisant la gestion des MDPH ;
- scolarisant les enfants en situation de handicap en milieu ordinaire jusqu’à la fin du lycée “à chaque fois que c’est possible” ;
- revalorisant le métier d’AESH ;
- rendant “beaucoup plus accessibles” les locaux et établissements recevant du public.
En ce qui concerne l’amélioration de l’accompagnement des familles, Valérie Pécresse propose de revaloriser les métiers liés au handicap. Pour ce faire, elle liste :
- la création d’un véritable statut d’aidant pour permettre l’aménagement de la vie professionnelle ;
- la création d’un droit au logement prioritaire pour les personnels soignants ;
- l’augmentation du crédit d’impôt pour l’emploi à domicile de 6 000 à 10 000 euros, avec 2 500 euros de plus pour une personne dépendante à charge.
Enfin, l’ex-ministre annonce vouloir redynamiser le plan autisme, lancer un plan sur la recherche en matière de handicap et améliorer la prise en charge des troubles de neuro-développement.
Philippe Poutou
Philippe Poutou. (© Iselyne Perez-Kovacs/Hans Lucas)
Le programme de Philippe Poutou, du Nouveau parti anticapitaliste, est le suivant :
- scolarité pour toutes et tous de la maternelle à l’université en milieu ordinaire ou protégé ;
- recrutement d’éducateurs, AVS, AESH, titulaires, formés et bien rémunérés ;
- zéro dérogation à l’obligation d’emploi de 6 % et adaptation du poste de travail ;
- maintien dans l’emploi des salariés se retrouvant en invalidité ;
- logement pour tous, en autonomie (accompagnement possible) ou dans des structures adaptées ;
- gratuité des frais de santé et d’appareillage ;
- déconjugalisation de l’AAH et montant égal au Smic ;
- embauches massives dans les MDPH.
Fabien Roussel
Fabien Roussel. (© Ludovic Marin/Pool via Reuters)
Fabien Roussel, le candidat du Parti communiste français, propose dans son programme de travailler sur la scolarité des personnes porteuses de handicap avec :
- la création d’un “véritable” métier d’accompagnement des élèves en situation de handicap, sous statut de la fonction publique, avec “un salaire digne” et “une formation ambitieuse” à hauteur de 90 000 postes ;
- le développement des structures dites adaptées avec une capacité d’accueil augmentée grâce à un plan de recrutement et de formation.
Mais aussi sur leur autonomie :
- en déconjugalisant l’AAH et en créant un revenu “d’existence” pour les personnes ne pouvant pas travailler ;
- en créant une “prestation universelle d’autonomie, sans barrière d’âge” pour “élargir le périmètre des actuelles prestations de compensation du handicap (PCH) et l’allocation personnalisée à l’autonomie (APA), lesquelles seront revalorisées” ;
- en renforçant l’égalité territoriale par un grand service public de l’autonomie, construit autour des Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).
Pour protéger le droit à l’emploi, Fabien Roussel promet le renforcement des obligations légales des entreprises en matière d’embauches et d’adaptation aux personnes porteuses de handicap. En ce qui concerne le droit au logement, il promet :
- le rétablissement de l’obligation d’adaptation aux personnes porteuses de handicap pour les logements neufs ;
- le conditionnement des aides publiques à l’accessibilité des lieux et des services.
Éric Zemmour
Éric Zemmour. (© Patrick Batard/AbacaPress)
Dans son programme, le fondateur de Reconquête! promet en premier lieu de “veiller au bien-être” des personnes en situation de handicap. Pour cela, il s’engage à :
- créer 15 000 places “dans des établissements et services adaptés pour adultes handicapés” ;
- individualiser l’AAH ;
- créer un statut pour les aidants familiaux qui octroie “des congés payés et un droit au répit” ;
- instaurer l’obligation, dans tous les nouveaux appels d’offres d’outils numériques pour les entités publiques et les grandes entreprises, de l’accessibilité aux personnes en situation de déficience visuelle ou cognitive.
Enfin, concernant la scolarité, Éric Zemmour promet :
- de recruter et former 50 000 AESH supplémentaires en étendant cet accompagnement à l’enseignement supérieur ;
- de développer les services et établissements spécialisés sur tout le territoire.